Evaluation des titres de sociétés cotées

Par Matheos MILANI

      I.        Les différentes méthodes d’évaluation 

Avant toute évaluation, il convient au préalable de réaliser une analyse stratégique et financière de l’entreprise : diagnostic des forces et des faiblesses, étude de marché, analyse financière (rentabilité, endettement, etc.) et prise en compte des perspectives futures de l’entreprise.

Une fois cette étape réalisée, l’évaluateur réfléchit à la méthode d’évaluation qu’il va utiliser, voici les principales :

        La méthode des multiples

Cette méthode est fondée sur la capitalisation de différents paramètres de rentabilité de l’entreprise. Le multiple sera d’autant plus élevé que les perspectives de croissance sont fortes, que le secteur d’activité de l’entreprise est peu risqué et que le taux d’intérêt est faible.

Cette méthode est comparative puisqu’elle repose sur l’élaboration d’un échantillon d’entreprises cotées comparables qui présentent les mêmes caractéristiques sectorielles, économiques, voire géographiques.

Les multiples les plus pertinents à utiliser sont le multiple de l’EBE (Excédent brut d’exploitation, EBITDA en anglais), le multiple du REX (Résultat d’exploitation, EBIT en anglais) et le multiple du résultat net.

Pour obtenir la valeur des capitaux propres à partir du multiple de l’EBE ou du REX (indicateurs avant frais financiers) il faudra retrancher à la valeur de l’actif économique l’endettement net. Si on veut obtenir directement la valeur des capitaux propres il faudra utiliser le multiple du RN (indicateur après frais financiers).

        La méthode patrimoniale

Cette méthode donne une valeur de marché à chacun des actifs et des passifs inscrits au bilan d’une entreprise. En effet, sur le bilan est inscrit la valeur comptable des actifs et des passifs et celle-ci est souvent éloignée de la valeur réelle pour des raisons comptables, historiques et fiscales. Ces valeurs comptables sont donc corrigées et réévaluées en fonction de trois approches donnant trois valeurs distinctes : leur valeur de négociation, leur valeur d’usage et leur valeur de liquidation.

A la somme des actifs réévalués, il conviendra de retrancher la somme des passifs réévalués et on obtiendra un actif net corrigé.

Cette méthode est essentiellement utilisée pour évaluer des petites entreprises ou des entreprises industrielles qui disposent d’actifs pour lesquels il existe un marché secondaire.

        La méthode DCF (Discounted cash flows)

Cette méthode est la plus courante pour l’évaluation d’entreprises cotées. Elle permet de calculer la valeur de l’actif économique en faisant la somme des flux de trésorerie prévisionnels disponibles après impôt actualisés au taux de rentabilité exigé par l’ensemble des pourvoyeurs de fond (le coût moyen pondéré du capital, CMPC) et de la valeur terminale. Il conviendra ensuite de retrancher la valeur de l’endettement net à la valeur de l’actif économique pour obtenir la valeur des fonds propres.

    II.        Focus sur la méthode DCF

Cette méthode étant la plus fréquente, nous allons la détaillée un peu plus en profondeur. Elle peut se structurer en trois parties :

  • L’estimation des flux de trésoreries disponibles périodiques et prévisionnels

Ces flux vont dépendre des hypothèses de croissance retenues et vont être calculés sur un horizon prévisible qui varie de 5 à 7 ans selon les secteurs. Les périodes ultérieures seront prises en compte dans la valeur résiduelle.

Détails du calcul :

EBE

– Dotations aux amortissements

= Résultat d’exploitation

– IS

+ Dotations aux amortissements

– Investissements

– Variation du BFR

= FLUX DE TRESORERIE DISPONIBLE (CASH FLOW)

Il faut ensuite actualiser chacun de ces flux au taux d’actualisation (CMPC) et en faire la somme.

  • La valeur terminale

Pour le calcul de la valeur terminale, la formule la plus utilisée est celle de Gordon-Shapiro. Elle est fondée sur un taux de croissance à l’infini du flux normatif.

La difficulté réside dans le calcul du flux normatif et le choix du taux de croissance à l’infini. Le flux normatif ne correspond pas au dernier flux prévisionnel, il doit être cohérent avec les hypothèses retenues au préalable et représenter le flux moyen que l’entreprise devrait générer de la fin l’horizon prévisible jusqu’à l’infini.

Formule de calcul de la valeur terminale : Flux normatif / (CMPC – Taux de croissance à l’infini)

La valeur terminale étant calculée la dernière année de l’horizon prévisible, elle doit être actualisée. Prenons l’exemple d’un horizon prévisible de 5 ans la valeur terminale sera calculée à la fin de la 5ème année. Il faudra donc l’actualiser au taux d’actualisation correspondant au CMPC avec n=5.

  • La valeur de l’endettement net

L’endettement net comprend l’ensemble des dettes bancaires et financières (à court, moyen ou long terme) auxquelles il faut retrancher les disponibilités et les valeurs mobilières de placement.

Concernant la dette, il faut raisonner en valeur de marché. Elle se calcule en faisant la somme des annuités restantes à payer actualisées au taux auquel l’entreprise pourrait s’endetter aujourd’hui sur le marché à maturité identique.

Exemple : Il reste 5 annuités de 1 000 € à rembourser à l’entreprise et que le taux d’endettement actuel sur le marché est de 5 %. On actualisera les cinq prochaines annuités au taux de 5 %, soit 1000/ (1+5 %)^n.

   III.        Conclusion

La méthode des DCF permet d’estimer une valeur de l’entreprise à l’instant T en prenant compte des différentes hypothèses et prévisions de croissance, d’investissement ou de rentabilité. Elle valorise les prévisions de flux que l’entreprise est susceptible de générer.

Néanmoins, cette méthode demeure « trop » dépendante des hypothèses retenues, du montant de la valeur terminale et il n’est pas toujours facile de réaliser un business plan cohérent et réaliste sur un horizon de 5 à 7 ans.